Préambule de la Déclaration de Bruxelles

Vu la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 qui affirme le principe de la non-discrimination et proclame que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit » et que « chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés qui y sont énoncés, sans distinction aucune, notamment de sexe » ;

Vu les dispositions prévues par les instruments juridiques des Nations unies dans le domaine des droits de l’homme en particulier celles concernant les droits des femmes, tels que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, qui indique en son article 3 que « les Etats parties au présent Pacte s’engagent à assurer le droit égal des hommes et des femmes de jouir de tous les droits civils et politiques énoncés dans le présent Pacte »;

Vu le commentaire général du Comité des droits de l’homme du 29 Mars 2000 et son observation n° 28 relatif à l’article 3 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui indique que « lorsqu’ils font rapport sur le droit à la vie énoncé à l’article 6, les États parties devraient fournir des données sur les taux de natalité ainsi que sur le nombre de décès imputables à la fonction de procréation des femmes. Ils devraient également fournir des données ventilées par sexe sur les taux de mortalité infantile. Ils devraient communiquer des informations sur toutes les mesures adoptées par eux pour aider les femmes à éviter les grossesses non désirées et à veiller à ce qu’elles ne doivent pas subir d’avortements clandestins mettant leur vie en danger » ;

Vu le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 16 décembre 1966 qui stipule, en son article 12, que « chacun a le droit de jouir du meilleur état de santé physique et mental susceptible d’être atteint » ;

Vu l’observation n° 14 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels du 11 août 2000 rappelant que le droit à la santé est étroitement lié à d’autres droits de l’homme comme le droit au respect de la vie privée et que parmi les libertés que comprend le droit à la santé, il figure le droit de disposer librement de son corps, notamment en matière de sexualité et de reproduction ;

Vu la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes du 18 décembre 1979 qui oblige les Etats « à assurer aux hommes et aux femmes les mêmes droits de décider librement et en toute connaissance de cause du nombre et de l’espacement des naissances et d’avoir accès aux informations à l’éduction et aux moyens nécessaires pour leur permettre d’exercer ces droits » ;

Vu les déclarations du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes en 1999 et notamment la recommandation n°24, m) qui stipule « que les Etats parties veillent à ce que les femmes puissent décider, sans entrave, de leur fécondité et ne soient pas forcées de recourir à des pratiques médicales dangereuses, telles que l’avortement clandestin, faute de service leur permettant de contrôler leur fécondité » ;

Vu la déclaration et le programme d’action de Beijin des Nations unies de 1995, issus de la quatrième conférence mondiale sur les femmes, qui indiquent que « les droits de la femme incluent le droit de jouir du meilleur état de santé possible en matière de sexualité et de reproduction et de prendre des décisions en matière de reproduction sans faire l’objet de discrimination, de contrainte ou de violence comme prévu dans les instruments relatifs aux droits de l’homme » ;

Vu les multiples recommandations de l’Organisation mondiale de la santé au sujet de l’avortement et ses directives techniques à l’attention des systèmes de santé des Etats qui définissent les droits relatifs à la procréation et à la santé reproductive comme des droits « qui reposent sur la reconnaissance du droit fondamental de tous les couples et des individus de décider librement et avec discernement du nombre de leurs enfants et de l’espacement de leurs naissance (…). Ces droits reposent aussi sur le droit de tous de prendre des décisions en matière de procréation sans être en butte à la discrimination, à la coercition ou à la violence » et qui réitère, en 2013, que « l’avortement et la planification familiale font partie d’un droit général à la santé » ;

Vu le Rapport du Comité des droits de l’homme de l’ONU sur le droit à la santé du 3 août 2011 qui stipule « Les Nations devraient garantir, pour toutes les femmes et les filles, un droit d’accès à l’avortement considéré comme faisant partie de leurs droits de l’homme » ;

Vu les recommandations du rapporteur spécial sur le droit à la santé de l’ONU, Adnan Grover, en octobre 2011, qui préconise la dépénalisation de l’avortement et indique que « les lois qui pénalisent et restreignent l’IVG constituent une violation de la dignité et de l’autonomie des femmes » ;

Vu la résolution 1607 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe relative à l’accès à un avortement sans risque et légal en Europe du 16 avril 2008 qui précise :

  • 2 : « Dans beaucoup de ces pays, de nombreuses conditions sont imposées et restreignent l’accès effectif à des services d’avortement sans risque, abordables, acceptables et adaptés. Ces restrictions produisent des effets discriminatoires puisque les femmes qui sont bien informées et qui ont les moyens financiers appropriés peuvent souvent avoir plus facilement recours à l’avortement légal et sans risque. »
  • 4 : « que l’avortement ne doit pas être interdit dans les délais de gestation raisonnables. Interdire l’avortement n’aboutit pas à réduire le nombre d’avortements, cela mène surtout à des avortements clandestins, plus traumatisants, et contribue à l’augmentation de la mortalité maternelle et/ou au développement du « tourisme de l’avortement », qui est coûteux, reporte le moment de l’avortement et engendre des inégalités sociales. La légalité de l’avortement n’a pas d’effet sur le besoin de la femme de recourir à l’avortement, mais seulement sur l’accès pour celle-ci à un avortement sans risque. »
  • 6 : « (…) le choix ultime d’avoir recours ou non à un avortement devrait revenir à la femme, qui devrait disposer des moyens d’exercer ce droit de manière effective »

Et invite les Etats membres du Conseil de l’Europe, entre autres, « à dépénaliser l’avortement dans les délais de gestation raisonnables si ce n’est déjà fait et à garantir l’exercice effectif du droit des femmes à l’accès à un avortement sans risque et légal » ;

Vu la Convention d’Istanbul du Conseil de l’Europe du 21 mai 2011, qui recommande aux parties de prendre les mesures législatives ou autres nécessaires pour ériger en infractions pénales, lorsqu’ils sont commis intentionnellement le fait de pratiquer un avortement chez une femme sans son accord préalable et éclairé ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000 qui indique que « toute personne a le droit d’accéder à la prévention en matière de santé et de bénéficier de soins médicaux dans les conditions établies par les législations et pratiques nationales. Un niveau élevé de protection de la santé humaine est assuré dans la définition et la mise en œuvre de toutes les politiques et actions de l’Union » ;

Vu la résolution du Parlement européen du 3 juillet 2002 relatif à la santé et aux droits sexuels et génésiques et son §12 qui recommande « pour protéger la santé et les droits génésiques des femmes que l‘avortement soit légalisé, sûr et accessible à tous » ;

Vu la résolution du Parlement européen du 1er février 2010 relatif à l’égalité entre les hommes et les femmes qui recommande aux Etats membres « de renforcer les droits sexuels et reproductifs des femmes en leur assurant une complète information sur leurs droits et sur les services disponibles et en leur garantissant un meilleur accès aux services de santé sexuelles et reproductives » ;

Vu le nouveau consensus européen sur le développement « Our world, Our dignity, Our futur» du 7 juin 2017 adopté par les Etats membres qui précise explicitement qu’il faut protéger les droits sexuels et reproductifs dans la politique de développement de l’Union;

Vu la résolution du Parlement européen du 12 septembre 2017 sur la proposition de décision du Conseil portant conclusion, par l’Union européenne, de la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence faite aux femmes qui « affirme résolument que le refus d’accorder des services liés aux droits et à la santé sexuelle et génésique, y compris la possibilité d’avortements sûres et légaux constitue une forme de violence à l’encontre des femmes et des filles », qui insiste sur le fait que « les femmes et les filles doivent avoir le contrôle de leur corps et de leur sexualité » et qui invite tous les Etats membres « à garantir une éducation sexuelle complète, un accès aisé des femmes à la planification familiale et à l’ensemble des services de santé génésiques et sexuelles y compris les méthodes de contraceptions modernes et l’avortement sûr et légal » ;

Considérant que d’un continent à l’autre, d’un État à l’autre, en Europe et au-delà, le droit à l’interruption volontaire de grossesse n’est pas considéré comme un acquis pour les femmes ;

Considérant que les avortements doivent encore trop souvent se réaliser dans la clandestinité ou s’effectuer sous le poids de la pénalisation et du sentiment de honte infligé aux femmes.

Considérant que chaque jour, nombre d’organisations et institutions internationales et européennes précitées, de l’ONU à l’OMS en passant par le Conseil de l’Europe ou le Parlement européen, n’ont de cesse de marteler l’enjeu démocratique et humain que représente le droit pour les femmes de disposer librement de leur corps et d’avoir accès à des avortements dans de bonnes conditions médicales.

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